La vaccination : Guide vers une santé meilleur

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Evaluation des programmes de vaccinations

La surveillance épidémiologique

Objectifs de la surveillance épidémiologique
Dans le cadre des maladies infectieuses, la surveillance épidémiologique a pour but:
– De mesurer l’incidence et la mortalité d’une maladie et de décrire la dynamique de sa diffusion dans le temps et l’espace. Elle permet également de connaître les caractéristiques des sujets atteints, en termes par exemple d’âge, de sexe, de présence de facteurs prédisposants, de profession. Cette épidémiologie descriptive, qui s’est étendue, dans un premier temps, des phénomènes épidémiques à l’ensemble du champ des maladies infectieuses en dehors de flambées ponctuelles, puis plus récemment au domaine des maladies chroniques, constitue le préalable à toute analyse épidémiologique plus approfondie.
– De disposer en continu d’informations permettant de détecter une épidémie. Les données épidémiologiques permettent de confirmer le diagnostic d’épidémie, d’en apprécier l’ampleur et l’extension ainsi que l’impact sanitaire.
– D’accroître les connaissances sur les facteurs de risque des maladies. Une description correcte des modalités de survenue de la maladie permet de générer des hypothèses sur les facteurs de risque de la maladie qui peuvent être explorées par les techniques de l’épidémiologie analytique (enquête cas-témoins ou de cohorte). Les conclusions de ces études sont utiles au choix des actions de prévention les plus efficaces et les plus efficientes. À l’occasion de phénomènes épidémiques, ces mêmes techniques sont utilisées pour identifier l’origine de l’épidémie afin de mettre en place le plus rapidement possible les mesures de contrôle au niveau de la source de contamination ou des sujets susceptibles d’être atteints.
– De mesurer l’impact de mesures de prévention et de contrôle et d’adapter leurs modalités de mise en œuvre.

Les modalités de la surveillance épidémiologique
Longtemps assimilée à la déclaration obligatoire qui en constituait le principal pilier, la surveillance épidémiologique a vu ses modalités se diversifier, pour mieux prendre en compte les caractéristiques spécifiques de chaque maladie à surveiller (essentiellement fréquence et gravité) ainsi que les modalités de leur diagnostic et de leur prise en charge (essentiellement diagnostic clinique ou biologique, maladie vue en ville ou à l’hôpital). Ainsi, en France, la surveillance épidémiologique repose actuellement sur plusieurs sources d’information, une même maladie pouvant être surveillée par plusieurs systèmes, ce qui facilite l’évaluation de la performance de chacun des systèmes.
– La déclaration obligatoire (DO). Elle concerne les maladies justiciables de mesures de contrôle au niveau international, national ou local. Actuellement 26 maladies sont incluses dans la liste des maladies devant être déclarées aux médecins-inspecteurs de santé publique (MISP) des Directions départementales des affaires sanitaires et sociales (DDASS). Depuis 1996, l’InVS s’est vu confier par la Direction générale de la santé la gestion opérationnelle du dispositif de surveillance des maladies à DO au niveau national.
– Les réseaux de médecins-sentinelles. Il s’agit essentiellement du réseau Sentinelles, qui s’appuie sur environ 500 médecins généralistes communiquant chaque semaine à travers un réseau télématique le nombre de cas concernant sept maladies infectieuses, qu’ils ont diagnostiquées dans leur clientèle.

– Les réseaux de laboratoires de microbiologie. Il s’agit de réseaux de laboratoires de virologie ou de bactériologie, publics et privés, qui fournissent de manière volontaire et régulière des informations sur les micro-organismes identifiés ou les sérologies positives réalisées lors de leur activité. Ils peuvent être généralistes, s’intéressant à plusieurs virus ou bactéries, ou spécialisés, s’intéressant à un agent pathogène précis. Mis en place pour les plus anciens par la cellule épidémiologie du Laboratoire national de la santé, ils sont actuellement gérés par l’InVS.

– Les centres nationaux de référence (CNR). Il s’agit le plus souvent de laboratoires de recherche. Au nombre d’une quarantaine dont près de la moitié au sein de l’Institut Pasteur, ils sont généralement spécialisés pour un agent pathogène précis. Leur mission est multiple : contribution à la surveillance épidémiologique, à partir des informations cliniques accompagnant les prélèvements, alerte par l’identification de cas groupés liés à un agent unique, expertise par l’étude fine des souches et les activités de typage.

– Les déclarations obligatoires des causes de décès, analysées par le service CépiDC de l’Inserm (anciennement Inserm SC 8), constituent une autre source intéressante de données de surveillance.

Les spécificités pour les maladies évitables par la vaccination
Les différentes fonctions de l’épidémiologie peuvent être illustrées dans le cadre des maladies vaccinables. C’est cependant l’épidémiologie descriptive qui est essentielle dans le processus de gestion des programmes de vaccination. Les données de surveillance épidémiologique sont indispensables, au moment de la mise sur le marché de nouveaux vaccins, pour décider de la pertinence et des modalités les plus adaptées de leur intégration dans le calendrier vaccinal. Au stade de suivi des programmes de vaccination mis en œuvre, les données de surveillance épidémiologique permettent de s’assurer de l’efficacité de la vaccination et d’adapter, le cas échéant, le calendrier de vaccination en fonction des résultats observés. À titre d’exemple, la recommandation d’intégrer la vaccination Hépatite B dans le calendrier de routine de l’enfant dans tous les pays, y compris ceux où le taux de portage de l’antigène HBs est faible, s’est appuyée sur l’incapacité des stratégies de vaccination ciblées sur des groupes à risque à réduire de manière significative, dans les pays industrialisés, l’incidence de l’infection par le virus de l’hépatite B. De même la vaccination antirubéoleuse des adolescentes a eu un impact limité sur l’incidence des infections rubéoleuses durant la grossesse, ce qui a conduit l’ensemble des pays industrialisés à opter, dans un second temps, pour une stratégie de vaccination généralisée du nourrisson.

Les différentes modalités de suivi des maladies évitables par la vaccination
Elles figurent, pour les maladies correspondant aux vaccins inclus dans le calendrier vaccinal, au tableau 3. Toutes les maladies pour lesquelles existe une obligation ou une recommandation de vaccination généralisée font l’objet d’une surveillance épidémiologique permettant d’évaluer l’impact de la mise en œuvre de la politique.
La DO n’intéresse que 5 des maladies à prévention vaccinales : la tuberculose, la diphtérie, le tétanos, la poliomyélite et l’hépatite B aiguë (dont la déclaration obligatoire est effective à partir de février 2003).
La rougeole, les oreillons, les syndromes grippaux (ainsi que la varicelle, non incluse dans le calendrier vaccinal) sont surveillés par un réseau de médecins généralistes Sentinelles (Unité 444 de l’INSERM). La grippe est également surveillée par le réseau des praticiens participant aux groupements régionaux d’observation de la grippe (GROG).
Les infections rubéoleuses durant la grossesse sont suivies par un réseau de laboratoires de virologie (RENARUB). Pour chaque cas identifié, des informations complémentaires sont recueillies auprès du clinicien. Jusqu’en 1996, les complications neurologiques de la rougeole étaient surveillées aussi par un réseau de laboratoires (RENAROUG). Depuis janvier 2000, dans le cadre de l’élimination de la poliomyélite, la surveillance de la circulation des entérovirus par des réseaux de laboratoires de virologie a été renforcée et a été mis en place le RSE (réseau de surveillance des entérovirus)
Les coqueluches hospitalisées sont suivies par un réseau sentinelle pédiatrique hospitalier associant cliniciens et bactériologistes (RENACOQ).
Les infections invasives à Hib, méningocoques et pneumocoques sont suivies par un réseau de laboratoires de microbiologie hospitaliers (EPIBAC).
Certaines de ces maladies bénéficient également d’un CNR (voir liste en annexe 3 et tableau 3).

Tableau 1 : Les modalités de surveillance des " maladies du calendrier vaccinal " 

Les outils utilisés pour la surveillance d’une maladie soumise à un programme de vaccination doivent s’adapter aux modifications de l’épidémiologie de la maladie induites par la vaccination. Nous illustrerons ce propos à travers l’exemple de la rougeole.

La rougeole faisait partie des maladies à DO jusqu’en 1986. À cette date, il a été décidé de la retirer de la liste, au vu des très faibles performances de cette surveillance (environ 1000 cas par an étaient notifiés au début des années quatre-vingt, pour une incidence annuelle réelle évaluée à plus de 500000 cas). Cette décision intervenait dans le contexte de la mise en place du réseau Sentinelles. Cette modalité de surveillance, qui paraissait en effet adaptée au suivi d’une maladie qui restait encore très fréquente, a permis de mesurer l’impact de la vaccination rougeoleuse. Dans la perspective de l’élimination de la rougeole au niveau européen, de nouvelles modalités de surveillance devront être mises en œuvre. Il sera en effet nécessaire d’identifier, de décrire et d’investiguer tous les cas ou les foyers résiduels afin de comprendre les raisons de la persistance de la circulation virale et de mettre en place des mesures de contrôle efficaces, en termes d’adaptation du calendrier vaccinal ou de modification des stratégies de promotion de la vaccination. Dans ce contexte où la maladie serait devenue rare, un réseau sentinelles ne serait plus assez sensible et ne permettrait pas de détecter l’ensemble de ces cas. Ainsi à terme, un retour à la déclaration obligatoire de la rougeole apparaît nécessaire. Un autre aspect de la surveillance devra également être modifié. Il s’agit de la définition d’un cas de rougeole servant de base à la notification. Actuellement, dans le cadre de la surveillance sentinelle, elle se base sur des critères uniquement cliniques (fièvre de plus de 3 jours associée à une éruption généralisée et à, soit une toux, soit un coryza soit une conjonctivite). Cependant, dans le contexte d’une maladie rare, cette définition n’est plus adaptée, de par son manque de spécificité, entraînant une proportion importante de diagnostics faussement positifs. Une étude anglaise réalisée alors que l’incidence annuelle de la maladie était encore d’environ 10000 cas, a montré que seuls 36 % des cas diagnostiqués comme rougeole par les médecins généralistes étaient confirmés au laboratoire. Cette proportion n’était que de 17 % pour les cas sporadiques et 11 % pour les cas survenant chez des enfants de moins de 1 an. Depuis 1994, une confirmation biologique des cas suspects de rougeole a été instaurée en Angleterre. Cette confirmation repose sur l’utilisation d’un test de détection des IgM dans la salive dont les performances ont été montrées comparables à celles du diagnostic sérologique. Ce test a été expérimenté en France dans le cadre d’une étude pilote et une réflexion est actuellement en cours sur les modalités de mise en place dans le futur d’une confirmation biologique des cas suspects en France. À l’approche de l’élimination, à l’instar de ce qui est déjà en œuvre pour les poliovirus, une analyse génétique des virus rougeoleux identifiés en France sera utile pour mieux connaître les chaînes de transmission résiduelles et faire la distinction entre cas importés et autochtones. A cet effet, un Centre national de référence pour la rougeole a été nommé en 2002.

En France, la politique vaccinale s'appuie principalement sur les avis et propositions du Conseil supérieur d'hygiène publique de France (CSHPF) section des maladies transmissibles et du Comité technique des vaccinations (CTV).

 

 

 

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